Je suis amoureuse de la fleur d'oranger. De celle que je
respire à même l'arbrisseau en la clémente saison. De celle qu'il m'arrive de
percevoir subrepticement à certains degrés de l'évolution d'une eau de toilette. De celle qui exhale, plus étourdissante
encore, dans mon imaginaire.
Toujours je l'ai désirée fraîche et mutine s'évanouissant
dans l'ombre voluptueuse. De ce floral paradoxe, je saisissais les beaux effets
avec Fleurs d'Oranger de Serge Lutens, mais le glissement charnel et lascif, se
réalisait trop vite parfois, sans prélude.
Furtivement, j'ai
respiré Séville à L'Aube. Une mise en scène olfactive, réalisée par
Bertrand Duchaufour et fondée sur le doux souvenir de l'ébauche d'une histoire
d'amour brève, entre Denyse Beaulieu et un bel hidalgo, sur fond d'Andalousie
et de procession religieuse.
Fraîcheur de l'aube. Exquises et inattendues, les notes de tête! Zestées, jaillissantes,
végétales! Avez-vous déjà froissé et humé la feuille verte et luisante d'un oranger en fleurs? Dés la première
pulvérisation, vous y êtes! Et ce geste, croyez-moi, vous l'accomplissez, un
sourire ému aux lèvres, un parfum de félicité accroché au coeur!
Le charme d'un premier regard appuyé. Un clin d'oeil
malicieux!
Sensuelles, les notes de coeur. A l'horizon, le soleil se
lève un peu plus encore, réchauffe la terre et les quelques bouquets charnus de
lavande qui tapissent le sol. Les parfums s'entremêlent, la lumière s'épaissit
et la fleur d'oranger se dénude, impudique. Epicurienne. L'accord riche, indolique
et languide du jasmin, d'une pointe de cire d'abeille et de la fleur d'oranger,
se pare de la douceur à peine vanillée du benjoin de Siam.
Les mains se frôlent. Baisers volés, jamais rendus...
Romantiques, les notes de fonds. Quelques nuages bleutés aux
contours imprécis flottent dans les airs. La fleur d'oranger, muse du parfum, se drape
d'un voile mauve et mélancolique de lavande Luiseiri de Séville et transparaît derrière
les volutes spirituelles et tièdes d'un encens de Somalie.
Il faut se quitter. Demeure la mélodie lointaine d'une
souvenance heureuse, d'autant plus belle que fragile et fugace...
Gageons que Séville à l'Aube connaîtra dés fin juillet (date de sa sortie dans les
boutiques) tout le succès qu'elle mérite! Un soliflore émouvant, vibrant,
frais, doux et sensuel. Une fleur d'oranger accomplie et vraie.
Le sillage de ce parfum est audacieux et sa tenue
remarquable, son seul "défaut" résidant dans ces deux mots: Edition Limitée.